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Philosophie - Un «selfie» au massacre de la Saint-Barthélemy

11 octobre 2014  | Stéphane Delisle - Enseignant en philosophie au cégep Limoilou, à Québec | Le Devoir de philo

L’avalanche d’«égoportraits» sous laquelle les réseaux sociaux croulent se situe à l’antithèse de la quête de soi de Montaigne

L’enseignant de philosophie Stéphane Delisle avance que, pour l’humaniste français Montaigne, l’encre et la plume ne remplissent pas la même fonction que l’iPhone 6 qui, par l’image ou la vidéo, tente d’élever nos actions issues du quotidien au rang des épopées homériques.

Photo: Francis Vachon Le Devoir
L’enseignant de philosophie Stéphane Delisle avance que, pour l’humaniste français Montaigne, l’encre et la plume ne remplissent pas la même fonction que l’iPhone 6 qui, par l’image ou la vidéo, tente d’élever nos actions issues du quotidien au rang des épopées homériques.
Deux fois par mois, Le Devoir lance à des passionnés de philosophie, d’histoire et d’histoire des idées le défi de décrypter une question d’actualité à partir des thèses d’un penseur marquant.
  
Au mois de juin, la jeune Breanna Mitchell profite d’une visite au camp d’extermination d’Auschwitz pour publier un « selfie » (traduisons : égoportrait), tout sourire, qui a déclenché une vraie tempête sur les réseaux sociaux. Certes, la principale intéressée a tenté de justifier, quoique maladroitement, son image numérique prise « à bout de bras », mais il n’en demeure pas moins que son moi, de même que sa vanité, a assurément connu ses 15 minutes de gloire.
 
Que penser encore du phénomène récent, très populaire auprès de la iGénération, où, par l’entremise d’un clic, on télécharge ad nauseam les vidéos des vedettes et autres quidams qui se versent sur la tête un seau d’eau glacée (« Ice Bucket Challenge ») pour soutenir la recherche sur la sclérose latérale amyotrophique (SLA) ? S’agit-il d’une nouvelle forme d’humanisme pixélisé accessible via Facebook ? Permettez-moi d’en douter étant donné la mise en scène qu’elle suppose pour que le donateur puisse récolter des dons. Au point où il est légitime de demander si l’essence même du don ne se trouve pas dévaluée par cette façon de s’exposer au vu et au su de tous.
 

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