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L’innovation sociale : une nouvelle dimension au sein du réseau des centres collégiaux de transfert


Entretien avec M.Simon Dugré, coordonnateur du Centre d’innovation sociale en agriculture (CISA) rattaché au Cégep de Victoriaville

Un texte d'Alain Lallier, Portail du réseau collégial

Note : Cet article a été réalisé avec la participation de Synchronex.

Nous sommes familiers avec les concepts d’innovation et de transfert technologique. Moins avec celui d’innovation sociale. C’est pourtant sous ce parapluie que loge un nombre de plus en plus important de centres collégiaux de transfert (CCTT). Monsieur Simon Dugré nous explique comment s’articule cette approche pour son centre, mais également pour les autres centres en innovation sociale du réseau Synchronex.

L’ARTERRE
Commençons par un exemple. Le CISA a contribué à mettre en place le service provincial : L’ARTERRE, une mise en commun d’un service de banque de terres et de banque de fermes afin de faire de l’accompagnement au jumelage entre les aspirants agriculteurs et les propriétaires fonciers. Simon Dugré explique : « Sur les bancs d’école du Cégep de Victoriaville et au niveau de l’Institut national d’agriculture biologique, il y a de futurs jeunes agriculteurs qui ne proviennent pas nécessairement du milieu agricole. Nous avons donc une responsabilité en tant qu’établissement de leur indiquer quelles sont les facilités d’accès au monde agricole. À cette fin, nous avons réussi avec plusieurs partenaires à déployer le nouveau service provincial l’ARTERRE qui a en un an a accueilli plus de 50 MRC au Québec. Des emplois d’agents ont été créés pour jumeler les aspirants agriculteurs à des propriétaires fonciers. C’est très novateur comme service. Le modèle sera de plus transférable dans d’autres régions du Canada. »
Voilà un bon exemple de projets d’innovation sociale.

L’innovation sociale au rendez-vous
Le centre affiche sur son site Web la définition suivante de l’innovation sociale : « Une nouvelle idée, approche ou intervention, un nouveau service, un nouveau produit ou une nouvelle loi, un nouveau type d’organisation qui répond plus adéquatement et plus durablement que les solutions existantes à un besoin social bien défini, une solution qui a trouvé preneur au sein d’une institution, d’une organisation ou d’une communauté et qui produit un bénéfice mesurable pour la collectivité et non seulement pour certains individus. La portée d’une innovation sociale est transformatrice et systémique. Elle constitue, dans sa créativité inhérente, une rupture avec l’existant. »

Pour Simon Dugré, les approches, les méthodes ou les paradigmes qui ont été utilisés dans le passé s’érodent avec le temps. « Avec l’innovation sociale, nous présentons une approche plus appliquée qui favorise la découverte de nouvelles façons de faire, de nouveaux services et de nouveaux produits qui répondront à ces besoins. »

L'équipe du CISA: De gauche à droite : Émilie Parent, Marie-Joëlle Brassard, Pierre Olivier Ouimet, Simon Louis Lajeunesse, Christine Gingras, Dominic Desjardins, Maryline Boisvert, Joël Alarie, Catherine Théberge, Philippe Franck-Imbeault, Nancy Roy, Geoffroy Ménard, Simon Dugré

Plus que l’agriculture
Le CISA travaille dans le domaine de l’agriculture. Mais, à travers le développement du centre, de plus en plus de projets ont également couvert le domaine de l’agroalimentaire et l’ensemble du système d’alimentation de la production, la transformation, la commercialisation et la consommation. Une des grandes préoccupations du centre vise à répondre aux usagers. « Notre prémisse à cet égard vise à faire de l’usager un acteur du changement, la base même de l’innovation. Nous intégrons rapidement ces usagers dans un processus d’innovation ouverte selon des méthodologies de Living Lab de recherche-action participative qui fait en sorte que nous transformons l’usager en un expert capable de canaliser ses expériences et son savoir afin de qu’il soit de même niveau que les experts-conseils dans le domaine. Ce processus permettra lorsque nous aurons trouvé une solution de la tester avec eux. L’adhésion et le transfert des solutions se font alors plus adéquatement et facilitent l’adoption de ces innovations à travers le milieu. »

Voici quelques exemples de projets réalisés qui illustrent bien l’approche :

Savoirs traditionnels autochtones et sécurité alimentaire
Dans ce projet, le centre a travaillé avec la communauté Cri de Chisasibi. Parmi les réalisations figure l’implantation d’un jardin qui sera perpétué par les autochtones. Les aînés Cri et leurs connaissances de l’alimentation traditionnelle ont été mis à contribution dans l’optique d’une sécurité alimentaire et de leurs traditions culturelles. L’objectif est de transférer le tout vers les jeunes pour des jardins potentiels et l’implantation de serres. « Cette année, nous avons tenu le premier festival d’automne à Chisasibi avec les jeunes des écoles primaires et secondaires. Nous avons aussi également développé avec les communautés d’Abedjiwan (Atikameks) des plans d’agriculture alimentaire. Tout ce développement de jardins est fortement encouragé par les communautés autochtones. »

Composter les matières résiduelles
La préoccupation environnementale est au cœur des activités du CISA. De plus en plus de municipalités sont soucieuses de gérer les matières organiques, résidus de nos tables ou des établissements et commerces. « Nous cherchons à gérer en compost potentiel toutes ces matières. Nous collaborons avec les MRC de la région sur cette question et pratiquons une méthode de laboratoire vivant en collaboration avec une entreprise qui s’occupe de la gestion des matières résiduelles. L’objectif du projet vise l’évaluation de tous les impacts des utilisations potentielles du compost par différents milieux sous l’angle des bénéfices sociaux, environnementaux et économiques. Nous pensons ici à des aménagements paysagers, à l’utilisation de terreaux pour des terres en friche et des jardins urbains. Les composts ont besoin d’être améliorés pour répondre à ces marchés potentiels. Nous travaillons également dans ce projet avec un centre de recherche technique, le CNETE (Centre National en électrochimie et en Technologies Environnementales) de Shawinigan actif en chimie verte. »

Once centres en pratiques sociales novatrices
Pour Simon Dugré, d’avoir créé en 2009 trois CCTT en pratiques sociales novatrices c’était faire preuve de la part du Ministère de l’Enseignement supérieur d’une belle ouverture par rapport aux sciences à mettre à contribution pour le développement de la société. Le faire sous forme de centres de transfert, c’était donner à des territoires la chance à une expression officielle. Les centres sont répartis sur l’ensemble du territoire québécois et particulièrement en région. Le réseau compte maintenant onze centres en innovation sociale.

Une nouvelle force au sein du réseau des centres collégiaux de transfert
Ces centres entendent travailler ensemble. Les réunions permettent des positionnements dans la planification entre autres pour mieux faire connaître les développements dans ce secteur d’activités. « Le Québec se positionne actuellement par ces centres. Le reste du Canada commence à s’intéresser à ce type de recherche appliquée. La présence des onze centres représente ainsi une des grandes forces en émergence du Réseau Synchonex. Onze centres sur un groupe de cinquante-neuf (59), ça commence à faire pas mal de monde. Gérontologie, écocitoyenneté, développement durable, agriculture agroalimentaire, personnes présentant des handicaps, les besoins des populations en matière de conditions de vie, l’intégration professionnelle des immigrants, l’innovation ouverte sont autant de champs d’activités qui peuvent répondre à des préoccupations sociétales actuelles. Le fait que cela se fasse au premier niveau de l’enseignement collégial constitue une excellente occasion de faire place à l’innovation. Amener des étudiants à comprendre et la société à saisir que nous pouvons utiliser ces centres pour faire des changements. Nous gagnons à faire connaître le groupe de centres en innovation sociale qui désire travailler en partenariat avec les technos et faire cette intégration des besoins technosociaux afin que ces innovations soient acceptées par le grand public et la société. Je compte sur nos centres pour amener le réseau Synchonex dans les cinq ou dix prochaines années dans un positionnement adéquat afin que les territoires puissent se servir de ces centres, affirme le coordonnateur du CISA. »

Travailler en synchronicité
Simon Dugré termine l’entretien en soulignant que « la nouvelle appellation “Synchonex” retenue par le Réseau Trans-Tech traduit bien cette préoccupation du réseau des CCTT de trouver la synchronicité requise pour répondre autant aux usagers, aux besoins de formation qu’aux besoins techniques ou sociaux. Synchronex sera au service des besoins des territoires urbains ou ruraux, des usagers dans les différents types de professions. Il s’agit là de plus de 1400 personnes en mode service. »
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Liste des centres en innovation sociale
• Centre de recherche et d’innovation en ART et ENgagement Social – ARTENSO (Cégep de Saint-Laurent)
Centre collégial d’expertise en gérontologie - CCEG (Cégep de Drummondville)
Centre d'étude en responsabilité sociale et écocitoyenneté - CÉRSÉ  (Cégep de Rosemont)
Centre d'initiation à la recherche et d'aide au développement durable - CIRADD  (Cégep de la Gaspésie et des Îles)
Centre d’innovation sociale en agriculture – CISA  (Cégep de Victoriaville)
• Centre de recherche et d’innovation en sécurité civile - Centre RISC (Campus Notre-Dame-De-Foy
• Centre de recherche, d’innovation et de transfert en arts du cirque – CRITAC (École nationale de cirque Montréal)
Centre de recherche pour l'inclusion des personnes en situation de handicap– CRISPESH (Cégep de Vieux Montréal – CollègeDawson)
Centre d'étude des conditions de vie et des besoins de la population - ÉCOBES   (Cégep de Jonquière)
Institut de recherche sur l'intégration professionnelle des immigrants – IRIPI  (Collège de Maisonneuve)
Living Lab en innovation ouverte - LLIO (Cégep de Rivière-du-Loup)
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