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Pratiques à impact élevé sur la réussite

L’importance de la recherche

Le déploiement de pratiques à impact élevé dans les cégeps (des défis à la portée de tous), d’après les travaux sur la réussite au collégial réalisés pour la Fédération des cégeps, a été présenté lors du dernier colloque de l’Association québécoise de pédagogique collégiale (AQPC). Des regards « rétrospectifs et prospectifs ».

Thérèse Lafleur, Portail du réseau collégial

Des mesures d’aide à la réussite existent dans plusieurs cégeps. Mais connaît-on réellement leur impact ?

Les pratiques à impact élevé sont des pratiques reconnues par la recherche, « qui ont un grand effet sur les résultats des étudiants », précise d’entrée de jeu le directeur des études du Collège de Bois-de-Boulogne, Sébastien Piché. Il commente cette intervention qui a porté essentiellement sur les enjeux et les pistes d’action mis en lumière dans le rapport La réussite au collégial : regards rétrospectifs et prospectifs.

Il souligne que le Plan d’action pour la réussite en enseignement supérieur 2021-2026 (PARES) du ministère de l’Enseignement supérieur (MES) propose « un train de mesures » pour atteindre les cibles de diplomation fixées pour le réseau collégial. Un plan qui rejoint des cibles liées à l’engagement étudiant, à l’enseignement et à l’environnement éducatif. « D’où l’importance de veiller à instaurer des pratiques dont l’impact élevé est démontré en lien avec ces cibles et de les déployer en se concertant. »

  • Les pratiques visant l’engagement étudiant

Que pouvons-nous faire pour que l’étudiant soit engagé dans son projet d’étude ?

  • Les pratiques associées à l’enseignement

Que peuvent faire les enseignants pour favoriser la réussite ?

  • Les pratiques relatives à l’environnement éducatif

Quel environnement pouvons-nous mettre en place pour faciliter la réussite des étudiants ?

 

La recherche : une validation

La question à se poser : est-ce que la recherche démontre que la pratique envisagée a un effet significatif sur les résultats des étudiants ?

Le grand mérite du rapport, pour lequel dix cégeps représentatifs de l’ensemble ont été visités, c’est de faciliter l’identification des démarches qui ont un impact élevé scientifiquement démontré. M. Piché souligne : « Sans la validation de la recherche, comment savoir si les efforts et les ressources ont été consacrés à des pratiques qui ont fait leurs preuves plutôt qu'à des pratiques seulement prometteuses ? ».

Certaines pratiques peuvent sembler prometteuses parce qu’elles sont innovantes. Un collège peut les estimer, globalement, car elles semblent fonctionner. Toutefois, le collège n’en mesure pas les effets comme la recherche peut le faire. Il ne dispose pas de données probantes.

Faire œuvre commune

En matière de pratiques à impact élevé, les cégeps ont tout intérêt à élaborer une vision partagée, au sein de leur communauté et avec le réseau. « Ce que le rapport nous invite à faire, c’est tendre à être des organisations apprenantes. Des organisations qui dépassent le stade où il y a uniquement une pratique réflexive individuelle. Les recommandations du rapport invitent les cégeps à passer à un niveau supérieur, celui de la réflexion collective. »

M. Piché affirme qu’« il faut réfléchir dans une perspective globale d’amélioration continue. En choisissant des pratiques appuyées par la recherche et adaptées au contexte, un collège pourra ensuite en mesurer les effets. Ainsi, il sera en mesure de porter un regard critique à l’échelle institutionnelle pour se réorienter, si nécessaire ».

Qualifier les approches

« La recherche sur la réussite au collégial est très riche et différentes mesures d’aide à la réussite ont déjà été validées. Plusieurs études ont permis d’identifier les pratiques qui fonctionnent le mieux et qui ont le plus grand impact. En présentant les enjeux et des pistes d’action, le rapport sur la réussite au collégial renseigne les collèges sur ces meilleures pratiques. Il démontre aussi que les collèges peuvent en faire plus. Alors, pourquoi se limiter à des pratiques prometteuses ? », questionne M. Piché.

  • Une pratique à impact élevé est reconnue par la recherche.
  • Une pratique prometteuse est une pratique innovante, appréciée de manière globale.
  • Une pratique validée est une pratique dont les effets sont évalués rigoureusement.
  • Une pratique exemplaire est une pratique validée et transférable.

Dans l’échantillon ciblé par l’étude de Carole Lavoie, force est de constater que des pratiques à impact élevé sont peu ou pas mentionnées par les cégeps visités. Les opérations valorisées par ces cégeps étaient surtout des pratiques qualifiées de prometteuses, dont certaines originales ou encore similaires entre cégeps. Par ailleurs, l’étude montre que ces cégeps ont de la difficulté à déterminer les conditions expliquant leur succès.

« Il y a des pratiques similaires et des pratiques originales dans les pratiques prometteuses. Certaines sont à impact élevé, mais les collèges n’en sont pas toujours conscients. Par exemple, les méthodes pédagogiques actives représentent une pratique à impact élevé qui est reconnue par la recherche. L’approche en milieu de travail en collaboration avec l’entreprise ou l’apprentissage contextualisé représente aussi une pratique à impact élevé », explique M. Piché.

Les meilleures

Le rapport de la Fédération présente les pratiques à impact élevé en enseignement supérieur sous trois angles. Il aborde d’abord quelques principes associés au rôle central de l’engagement de l’étudiant dans sa réussite, notamment l’importance qu’il accorde à ses études et à son intégration au collège. En ce sens, une expérience de qualité motivera davantage l’engagement étudiant actif.

Deux tableaux illustrent les pratiques à impact élevé relatives à l’enseignement et à l’environnement éducatif.

Les défis du déploiement

Qu’est-ce qu’un collège peut faire ? Que faire comme réseau ? M. Piché réfère d’abord aux dix enjeux et aux nombreuses pistes d’actions identifiés dans le rapport.

Il insiste aussi sur l’importance capitale des pratiques à impact élevé. « C’est la principale assise de ce plan d’action. Mettre en œuvre toutes ces recommandations sans se baser sur la recherche, sur ce qui a été validé comme pratiques, pourrait compromettre l’atteinte de nos objectifs. Nous allons nous améliorer, mais pas autant que ce que nous sommes capables de faire. »

M. Piché conclut en identifiant trois grands défis à relever pour être des institutions et un réseau qui se veulent innovants et agiles.

« Réalistement, nous ne pouvons pas mettre en œuvre toutes les pratiques recommandées dans le rapport. Le défi numéro un est donc de se documenter suffisamment afin de planifier l’implantation. »

« Le deuxième défi concerne la donnée. Le système d’information doit générer des données de qualité qui permettent une évaluation continue des pratiques déployées. Ainsi, les collèges peuvent faire des ajustements. Et les collèges ne peuvent pas prétendre être des organisations apprenantes s’ils n’utilisent pas les données habilement, s’ils n’ont pas cette “intelligence d’affaires”. »

« Enfin, le troisième défi est celui de la collaboration. Les pratiques à impact élevé sont très rarement des pratiques pouvant être réalisées de façon individuelle. Cela demeure un défi de mobiliser des équipes et de briser les traditionnels silos. »