Articles

Les technologies numériques, frein ou accélérateur de la réussite ?

Par Élise Prioleau

L’ère du numérique a fait son entrée dans les salles de classe il y a plus de vingt ans. Au cours des dernières décennies, les réseaux intranet, les PowerPoint et les cours en ligne se sont imposés au sein des pratiques éducatives. Quels sont les avantages de ces technologies ? Le déploiement du numérique en éducation doit-il être balisé ? Comment protéger les plus vulnérables à la cyberdépendance?

Table ronde Le numérique, frein ou accélérateur à la réussite?

Animateur: Bruno Guglielminetti, porte-parole, CEFRIO;

Panellistes:
Philippe Clément, président, Fédération étudiante collégiale du Québec
Magali Dufour, professeure agrégée, département de psychologie, UQAM
Martin Pelletier, conseiller technopédagogique, Cégep régional de Lanaudière
; Élise Desgreniers, enseignante de mathématiques, Collège Lionel-Groulx

(Crédit photo: Mario Landry, Cégep de Rivière-du-Loup)

 

« Le numérique, oui, mais pas n’importe comment. » C’est le point de vue qui a été largement partagé par les enseignants, chercheurs et étudiants présents à la table ronde sur les enjeux du numérique, organisée le 31 octobre au congrès de la Fédération des cégeps. « La technologie est un moyen qui peut faciliter le travail des enseignants et soutenir la réussite des étudiants, mais elle n’est pas une fin en soi », a fait valoir Philippe Clément, président de la Fédération étudiante collégiale du Québec. « Les cours qui m’ont le plus intéressé au cégep étaient souvent dépourvus de technologies », a-t-il reconnu.

 

 

Puisque la révolution numérique est bel et bien amorcée, comment déployer ces technologies de manière bénéfique autant pour les étudiants que pour les enseignants ? Selon Magali Dufour, professeure en psychologie à l’UQAM et chercheuse en cyberdépendance, il faudra des politiques et des règles collectives pour baliser l’utilisation du numérique dans le monde de l’éducation.

« Le déploiement du numérique demande des ressources humaines et matérielles supplémentaires, selon la chercheuse. Il ne faut pas oublier de dépister les étudiants les plus à risque de dépendance. Pour cela, les institutions doivent évaluer leurs nouvelles pratiques lorsqu’elles impliquent des technologies dont on connaît encore peu les effets psychologiques. »

 

« La surstimulation pourrait être le principal risque associé à l’utilisation des technologies »

- Magali Dufour, professeure en psychologie à l'UQAM 

 

Prévenir la surstimulation

L’utilisation excessive de l’écran conduit à des problèmes de santé physique et mentale, explique Magali Dufour. « Dans une étude réalisée auprès de jeunes de 18 à 25 ans, on observe que 40 % d’entre eux souhaitent diminuer « moyennement à beaucoup » le temps passé devant un écran. Près de 30 % d’entre eux ont l’impression qu’ils passent trop de temps devant un écran. »

Les étudiants font face à une offre technologique foisonnante. Pour certains, il est difficile de séparer l’utilisation de la technologie dans la cadre des études et dans le cadre personnel, explique Mme Dufour. 

« Dans les cas où ils s’habituent à utiliser plusieurs applications simultanément,ils deviennent tolérants à la surstimulation. Cette situation peut conduire à une perte d’intérêt lorsqu’ils font face à une seule personne, que ce soit leurs proches ou leur enseignant », explique la chercheuse.

« C’est pourquoi nous travaillons à dépister et aider ceux et celles qui ont plus de difficulté à se contrôler, en particulier ceux et celles aux pris avec un déficit d’attention. »Ce travail de prévention commence dans la salle de classe, pense Martin Pelletier. « Ça fait partie du rôle de l’enseignant de mettre des balises.Par exemple,imposer aux étudiants un délai de réponse de 24h à 48h aux courriels. »

 


La technologie « alliée »

Dans certains contextes, la technologie a su démontrer son efficacité pour soutenir la réussite des étudiants. « J’ai vu de belles histoires », a raconté Martin Pelletier, conseiller technopédagogique au Cégep régional de Lanaudière.

« Je connais des profs qui enregistrent des capsules vidéo dans lesquelles ils donnent des explications aux étudiants, qui peuvent les réécouter au besoin. » En réduisant le temps d’explication de la matière en classe, ces enseignants gagnent du temps et améliorent leurs interactions avec les étudiants, explique Martin Pelletier. 

 

 

« En classe, le tableau numérique me permet de mieux accompagner les étudiants en leur montrant les documents au tableau et en les annotant avec eux. »

-  Élise Desgreniers, enseignante en mathématiques au Collège Lionel-Groulx

 

 

Le numérique, un choix  

L’enseignante en mathématiques Élise Desgreniers utilise abondamment la technologie numérique autant dans sa préparation de classe que pendant ses cours. Toutefois, selon l’enseignante en mathématique, il est important pour les enseignants de maîtriser les outils qu'ils choisissent. 

« La technologie nous impose d’être plus flexibles. Lorsque l’ordinateur est déchargé, on doit avoir un plan B ou en inventer un sur-le-champ », explique-t-elle. 

Bien que le numérique puisse rendre de précieux services, entre autres en permettant aux étudiants éloignés de suivre un cours à distance avec leur enseignant, ces outils ne remplaceront pas les cours en classe, disent d’une même voix les panélistes.

Pour Magali Dufour, il faut préserver et encourager les interactions réelles dans le cadre des cours, car elles nourrissent à la fois les enseignants dans leur travail et les étudiants dans leur apprentissage. « Ce n’est pas la technologie qui fait qu’un cours est intéressant. C’est la qualité de l’orateur, sa passion, la maîtrise de sa matière et la qualité de la connexion avec les étudiants », résume Mme Desgreniers.

 






Infolettre Le Collégial

Soyez informés de l'actualité dans le réseau collégial. L'infolettre est publiée mensuellement de septembre à mai.

Je m'inscris