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Rapport sur la profession infirmière - Pas question de se priver des infirmières du collégial, tranche Dubé

Article publié par La Presse - Louise Leduc

Dans le rapport sur les états généraux de la profession infirmière obtenu par La Presse, les commissaires Francine Ducharme et Robert Salois proposent, parmi 31 recommandations, que les infirmières ne puissent plus entrer dans la profession par une formation collégiale.

16 septembre 2021 - « Surtout avec la crise que l'on vit, on n'en est pas là », a dit jeudi Christian Dubé, ministre de la Santé et des Services sociaux, balayant du revers de la main l'idée que les infirmières devraient nécessairement décrocher un baccalauréat.

Dans le rapport sur les états généraux de la profession infirmière obtenu par La Presse, les commissaires Francine Ducharme et Robert Salois proposent, parmi 31 recommandations, que les infirmières ne puissent plus entrer dans la profession par une formation collégiale.

Le ministre Dubé dit avoir pris connaissance du rapport et s'être entretenu avec les commissaires. Ce diplôme universitaire obligatoire, que l'Ordre des infirmières appelle de ses voeux depuis des années, n'est pas ce que souhaite M. Dubé.

Par contre, a-t-il dit en mêlée de presse, les recommandations visant à valoriser le rôle des infirmières l'intéressent et il assure qu'il s'y penchera.

En entrevue, Bernard Tremblay, président de la Fédération des cégeps, a pour sa part dit trouver « honteux » que cette recommandation soit faite alors que toute l'énergie devrait plutôt aller à la rétention des infirmières et aux conditions d'exercices.

Certes, reconnaît-il, le programme de soins infirmiers des cégeps doit être révisé. « Je suis en poste depuis sept ans et c'est même avant mon arrivée qu'on le réclamait du ministère de l'Éducation supérieure. »

Mais il refuse de croire qu'une infirmière formée au cégep soit moins nécessaire à l'hôpital. « C'est bien plus une question d'expérience et d'intégration. Je ne suis pas sûr que je suis si rassuré si j'ai une infirmière bachelière qui sort de l'université [si je suis hospitalisé]. »

Selon le rapport des états généraux sur la profession infirmière, ce sont aussi bien les formations collégiales qu'universitaires qui devraient être revues.

En entrevue mercredi, les commissaires ont fait valoir que les infirmières émanant des cégeps ne peuvent pas normalement travailler aux urgences ou aux soins intensifs.

Bernard Tremblay, lui, comprend que l'Ordre voudrait transformer les infirmières en « quasi médecins ». Si tel est le cas, « qui va faire le travail technique » ?

« Avant de proposer une solution complètement déconnectée du besoin actuellement criant d'infirmières, travaillons à mettre à jour la formation collégiale, formation qui n'a pas été mise à jour dans les 20 dernières années », plaide aussi Samuel Vaillancourt, président de la Fédération étudiante collégiale du Québec.

« Ce que propose l'OIIQ aujourd'hui est complètement déconnecté du contexte actuel de pénurie de main-d'oeuvre, mais aussi de la mission des établissements collégiaux, soit de garantir l'accessibilité aux études supérieures à un plus grand nombre. Ce n'est pas l'ensemble des personnes étudiantes qui ont le privilège de pouvoir s'offrir un baccalauréat », a ajouté M. Vaillancourt.

Yves de Repentigny, responsable du regroupement cégep à la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ-CSN), ne comprend pas lui non plus la logique du rapport des états généraux.

« Avec les milliers d'infirmières qu'il manque, allonger les études pour les faire passer de trois ans à cinq ans, compte tenu de la réalité des candidates à la profession (beaucoup de retour aux études, de mères de famille et d'étudiantes devant travailler en même temps), ce serait se magasiner des ruptures de service. Le ministre Dubé l'a bien compris. »

Tout comme Bernard Tremblay, Yves de Repentigny dénonce le fait qu'à son avis, les dés étaient pipés. « C'est ce que donne ce genre d'exercice cousu de fils blancs où la conclusion est écrite à l'avance. »