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Un professeur du Cégep de l’Outaouais veut démontrer l’utilité pédagogique de ChatGPT

Maude Ouellet , Radio-Canada

Alors que le milieu académique redoute une montée en flèche du plagiat depuis l'arrivée de l'application ChatGPT, un professeur du Cégep de l’Outaouais veut démontrer qu’il est possible d’en faire bon usage et de l’utiliser à des fins d’apprentissage.

Le robot conversationnel de l’entreprise américaine OpenAI est capable de répondre rapidement à des questions complexes sous la forme de textes, et ce, dans plusieurs langues, grâce à l'intelligence artificielle (IA).

Depuis son lancement en novembre dernier, l’application a suscité une levée de boucliers à travers le monde. Des universités comme Science Po à Paris l’ont déjà bannie, de même que la ville de New York qui empêche son utilisation sur tous les appareils électroniques des écoles publiques.

Utiliser l’intelligence artificielle pour générer des dissertations

Pierre-Luc Vallée, professeur de sciences politiques au Cégep de l’Outaouais, pense toutefois que ChatGPT peut se montrer utile dans un contexte académique.

Pour le prouver, il a demandé à ses étudiants de s’en servir pour préparer des exposés oraux sur les grands thèmes qui seront abordés au cours de la session, comme la guerre froide et le conflit israélo-palestinien : un exercice qu’il décrit avant tout comme une expérimentation.

C’est intéressant d’utiliser cette application pour des fins autres que ce que les gens anticipent, c’est-à-dire le plagiat, explique M. Vallée. Le but, c’est d'initier les étudiants à cette application dans un cadre pédagogique, de se servir de l’intelligence artificielle pour apprendre.

Les étudiants se servent de ChatGPT un peu comme d'une encyclopédie en ligne. Ils commencent par poser une question plus générale, pour ensuite en préciser certains aspects.

Simone Larose, étudiante au Cégep de l'Outaouais.

Simone Larose, étudiante au Cégep de l'Outaouais

Photo : Radio-Canada / Gabriel Le Marquand Perreault

C’est vraiment super d’avoir l’opportunité d’utiliser [ChatGPT] dans un contexte scolaire, parce j’ai vu beaucoup d’opinions négatives sur le logiciel dans les médias, dit Simone Larose, une des étudiantes de Pierre-Luc Vallée.

Elle comprend les réserves émises par certains professeurs sur la question du plagiat.

On n’a pas les sources et on ne serait pas en mesure de bâtir une bibliographie, argue-t-elle cependant.

William Fernandes-Bélanger, étudiant au Cégep de l'Outaouais.

William Fernandes-Bélanger étudie les sciences humaines au Cégep de l'Outaouais.

Photo : Radio-Canada / Gabriel Le Marquand Perreault

Son collègue William Fernandes-Bélanger croit aussi qu’il serait relativement facile de repérer les cas de plagiat.

C’est beaucoup trop bien écrit pour que ce soit nous qui l’ayons écrit, dit-il.

Oui, on va utiliser ces réponses, mais on va aussi aller appuyer nos recherches sur des éléments qu’on a trouvés ailleurs. [...] On fait toujours l’effort d’aller confirmer ce qu’on lit parce qu’on ne peut pas juste présumer que c’est ça, ajoute-t-il.

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Revoir les méthodes d’évaluation

Pierre-Luc Vallée croit que le milieu académique n’aura tout simplement pas le choix de s’adapter aux applications comme ChatGPT.

Une fois que la technologie est en place, c’est difficile de contourner ses impacts.

Pierre-Luc Vallée, professeur de sciences politiques au Cégep de l'Outaouais.

Pierre-Luc Vallée espère que le milieu académique sera en mesure de trouver des utilités pédagogiques à ChatGPT.

Photo : Radio-Canada

Les professeurs pourront se servir d'outils pour détecter les textes générés par l’IA

. Le créateur de ChatGPT en a lancé un au début de la semaine. C’est aussi le cas de l'entreprise montréalaise Draft & Goal, qui affirme que le sien est fiable à 93 %.

Selon M. Vallée, les enseignants devront également revoir leurs méthodes d’évaluation. Plusieurs universités américaines et australiennes ont déjà choisi de favoriser les tests en classe avec papier et crayon, ou encore d’accroître la surveillance des examens tenus à distance par le biais de logiciels.

Certains font des parallèles avec l’apparition de la calculatrice qui faisait craindre que les étudiants n’apprennent plus à calculer. Ça va nous amener davantage à évaluer la réflexion, avance M. Vallée.

Des étudiants du Cégep de l'Outaouais assis devant des ordinateurs.

Les étudiants du cégep de l'Outaouais présenteront leur exposé oral la semaine prochaine.

Photo : Radio-Canada / Gabriel Le Marquand Perreault

Égide Royer, psychologue spécialisé sur la question de la réussite scolaire, abonde dans le même sens. Il croit que les professeurs pourraient par exemple demander à leurs étudiants de déterminer en quoi un texte produit par l’IA est juste, mais aussi, en quoi il est erroné.

Source: Radio-Canada

4 février 2023