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«Des infirmiers et infirmières d’Afrique arrivent à Saint-Hyacinthe»

par Alice Girard-Bossé

Ils arrivent du Maroc, de l’Algérie, de la Tunisie ou encore du Cameroun et intégreront bientôt le système de santé, qui fait face à une importante pénurie de personnel. Vingt-huit infirmiers et infirmières en provenance d’Afrique entameront sous peu une formation d’un an à Saint-Hyacinthe. La Presse est allée à leur rencontre lors d’une journée d’intégration.

Deux semaines après son arrivée, Fatima Guelai, 23 ans, s’adapte tranquillement à sa nouvelle ville. « Dès qu’on est arrivés, on est sortis pour visiter. On était curieux. On voulait tout découvrir. » Ce qui l’a marquée ? « La neige, bien sûr, s’exclame-t-elle. On est habitués à la chaleur, et là, il fait vraiment froid. »

Ces jeunes professionnels, diplômés en soins infirmiers dans leur pays d’origine, suivront une formation d’un an au cégep de Saint-Hyacinthe pour parfaire leurs connaissances. Ils pourront ensuite faire leur entrée au CISSS de la Montérégie-Est.

Fatima Guelai a suivi une formation de trois ans au Maroc, avant d’exercer la profession d’infirmière pendant trois ans. Elle est fébrile à l’idée de retourner sur les bancs d’école, ici, au Québec. « C’est un plaisir, parce que je peux acquérir d’autres connaissances », dit-elle, en marchant à travers le cégep.

Ces 28 candidats d’Afrique ont fait leur arrivée au Québec grâce au projet de « reconnaissance des compétences » annoncé par le gouvernement du Québec en 2022 et visant, à terme, à recruter à l’international 1000 infirmières et infirmiers.

Brigitte Petrie, présidente du Syndicat des professionnelles en soins de la Montérégie-Est, se réjouit du recrutement, mais s’inquiète de la rétention du personnel. « Actuellement, beaucoup de professionnels de la santé quittent le réseau de la santé, se dirigent vers les agences ou tombent en congé de maladie, dit-elle. Si on va chercher du personnel à l’étranger et qu’on veut le garder, il faut que les conditions de travail dans le réseau s’améliorent. »

Un défi de taille : l’examen d’admission à la profession

Pendant leurs études, les candidats pourront travailler à titre de préposés aux bénéficiaires. Une fois leur formation achevée, ils devront réussir l’examen d’admission à la profession de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ).

Lors du dernier examen de l’OIIQ, en septembre 2022, seules 19,5 % des personnes diplômées à l’extérieur du Canada ont réussi l’examen lors de leur première tentative, contre 56 % chez les diplômés du Québec. Les candidats qui échoueront à la formation pourront toutefois continuer à travailler comme préposés aux bénéficiaires, avait précisé Québec lors de l’annonce du programme.

Avant de faire leur entrée dans le réseau de la santé, les élèves tentent de s’adapter à leur nouvelle vie dans la province. « Je viens d’une petite ville au Maroc, donc je suis contente d’être à Saint-Hyacinthe. C’est un peu difficile de s’éloigner de la famille, avoue Fatima Guelai, mais il faut aussi penser à notre avenir. »

Avec l’aide de la Maison de la famille des Maskoutains, elle s’est déniché un bel appartement, au centre-ville de Saint-Hyacinthe, confie-t-elle avec fierté. Elle y habite avec son conjoint, qui a quitté son pays natal pour l’accompagner. « Au Maroc, il était enseignant. Il ne sait pas s’il va continuer en enseignement ou prendre un autre chemin. Il est toujours en train de réfléchir », dit-elle.

Favoriser l’intégration

Afin de favoriser leur intégration, les élèves ont deux semaines d’activités préparatoires. Au menu : tour de la ville de Saint-Hyacinthe, vaccination, essayage de masques et d’uniformes, mise à niveau en informatique. « Ils nous ont aussi expliqué le fonctionnement de l’autobus et les abonnements téléphoniques », dit Badreddine Mouhassir.

L’infirmier de 27 ans n’a pas hésité à quitter son pays natal, lorsqu’il a vu passer sur Facebook le programme de recrutement du Québec. « Laisser ma mère, ça a été un peu difficile. On se parle presque chaque jour. Elle me manque, mais ça va », laisse-t-il tomber, ému.

Le candidat originaire du Maroc habite dans un grand appartement avec quatre autres élèves du programme. « On est devenus comme une petite famille. Je me rends au cégep à pied de mon appartement. Même pendant les tempêtes », dit-il en souriant.

Il apprécie le calme de sa nouvelle ville. « Je viens de Casablanca, la plus grande ville du Maroc. C’est une ville stressante. Saint-Hyacinthe, c’est tranquille. C’est apaisant. J’aime vraiment ça », dit-il en souriant.

Le jeune homme, qui est titulaire d’une maîtrise en management d’établissements de santé, rêve d’une grande carrière. « Au Maroc, il n’y a pas d’avantage à avoir fait la maîtrise. Tu es infirmier et tu stagnes. Je veux avoir une belle carrière ici. C’est ce qui me motive, dit-il. J’ai de l’ambition. »

 

9 mars 2023